Des touristes au Lioran : le registre d’entrée de l’hôtel Daude (1912-1918)
Profitant de l’engouement de
Ouvert de juin à septembre, l’hôtel accueille des pensionnaires en quête d’air pur et de repos. Chaque nouvel arrivant est consigné dans un registre d’entrée détaillé, qui permet d’en savoir un peu plus sur ces premiers visiters estivaliers.
La tenue de ce registre est imposée par la loi du 22 juillet 1791 : « Dans les villes et dans les campagnes, les aubergistes, maîtres d'hôtels garnis et logeurs seront tenus d'inscrire de suite et sans aucun blanc, sur un registre en papier timbré, et paraphé par un officier municipal ou un commissaire de police, les noms, qualités, domicile habituel, dates d'entrée et de sortie, de tous ceux qui coucheront chez eux, même une seule nuit. »
Ces informations avaient pour but de permettre une surveillance accrue de la population, en retrouvant la trace de fugitifs tentant d’échapper à la police. Tenu entre 1912 et 1918, le registre présenté ici a été imprimé pour répondre à cette loi : les colonnes invitent le client à donner toutes les informations requises, et demandent en outre l’étape précédente du voyage et le motif du séjour.
La loi dispose également que ces registres devront être présentés tous les quinze jours soit aux officiers municipaux, soit aux officiers de police, mais il semble que cette disposition n’ait pas été respectée. Le registre d’entrée de l’hôtel Daude n’est visé par la gendarmerie que quatre fois entre 1912 et 1918.
Comme on peut s’y attendre, les personnes fréquentant l’hôtel font majoritairement partie des classes aisées de la société : médecins, négociants, rentiers, hommes de lettres, etc. Mais on trouve également quelques professions qui sortent du rang : un mécanicien, un serrurier, quelques prêtres, un vicaire et un secrétaire-archiviste. Loin des combats de la guerre, l’hôtel voit également apparaître à partir de 1916 les premiers permissionnaires venus se ressourcer. Fernand Grisel, interprète de 37 ans, passe ainsi 4 jours en mai en compagnie de sa femme. Ce fut un séjour au grand calme : à cette période de l’année, ils sont les seuls pensionnaires de l’hôtel !
Quelques Auvergnats choisissent de profiter du repos au Lioran, mais la plupart des voyageurs viennent de plus loin. En-dehors de Paris et de la région parisienne, qui sont bien représentés, les origines sont diverses : Toulouse, Cahors, Roanne, Châteauroux, Amiens... L’hôtel accueille même des étrangers, Anglais, Belges, Italiens, Australiens, Argentins, etc. C’est donc tout un monde cosmopolite qui se retrouve au Lioran pour respirer l’air frais cantalien.
Contrairement aux origines des clients, le motif du séjour varie peu : cure d’air, repos, villégiature, promenade et excursions pour les amateurs de paysages… on cherche avant tout le calme et la tranquillité. Seuls quelques esprits curieux viennent pour approfondir leurs études sur la botanique et les insectes, sans doute au grand bonheur du propriétaire de l’hôtel, lui-même passionné par ces sujets. D’autres pensionnaires sont de passage et ne restent qu’une seule nuit, comme un certain Pierre Laval, avocat à la cour âgé de 34 ans en 1917, qui se fera connaître quelques années plus tard pour sa politique de collaboration avec l’Allemagne nazie.
Précurseur du tourisme au Lioran, Pierre Daude a su tirer profit des montagnes cantaliennes pour attirer un panel de pensionnaires varié avide d’air pur et de repos.
Fonds Daude, en cours de classement