Terre d’accueil pour les européens tourmentés par l’Histoire, l’Argentine a, à la fin du 19ème siècle, enrichi son héritage espagnol des cultures italienne, allemande et juive ashkénaze. La culture amérindienne y est davantage occultée que dans d’autres pays sud-américains. Un sentiment national s’est néanmoins constitué sur ce patchwork de mémoires avec des thèmes spécifiques : le personnage du gaucho, le gardien de troupeau de la Pampa. Le tango, originaire de Buenos Aires est devenu, partout dans le monde, l’une des danses de bal les plus répandues.
Au 20ème siècle, de grands écrivains émergent : Julio Cortázar, Manuel Puig, Jorge Luis Borges... Sous l’influence italienne et allemande, la musique symphonique et l’opéra sont devenus parties intégrantes de la vie culturelle. Les Argentins se saisissent très tôt du 7ème art, mais le 20e siècle est agité par une histoire politique chaotique et cruelle, marqué par de brutales influences nord-américaines : à la décennie péroniste (1946-1955), autoritaire et paternaliste, succède une dictature militaire (1974-1983) et sa longue nuit de censure et de répression. Un semblant de démocratie est ensuite corrompu par l’introduction d’un capitalisme sauvage sous les présidences Alfonsin et Menem. Pendant la dictature, le cinéma est désorganisé, les cinéastes en exil ou réduits au silence. Dans les années qui suivent ils souffrent de la paupérisation de la culture. Petit à petit pourtant une nouvelle génération de cinéaste apparaît, à qui il tient à cœur de raconter l’histoire douloureuse du pays (Solanas, Agüero, Puenzo…). En Europe, les succès publics de Les neuf reines (2001) de Fabián Bielinsky et de Historias minimas (2003) de Carlos Sorin marquent un regain d’intérêt de la critique et des spectateurs pour ce cinéma qui nous est profondément familier, comme une autre histoire de nous-mêmes.