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 illustration saint exupery

Antoine de Saint-Exupéry (1900-1944) a récemment bénéficié d'une actualité littéraire inattendue qu'aucune logique commerciale ne justifie : pas le moindre anniversaire, pas la moindre commémoration à l'horizon...

 

Et pourtant, le 9 septembre 2010, la chaîne « direct 8 » (de la TNT) (re)diffusait le téléfilm réalisé en 1994 par Robert Enrico, intitulé « Saint-Exupéry : la dernière mission ». Bernard Giraudeau y tient le rôle de l'écrivain-aviateur, et Maria de Medeiros celui de son épouse Consuélo, sur un scénario et des dialogues de Marcel Jullian.

  

9 jours plus tard (soit le 18 septembre) paraissaient simultanément le très attendu « Petit Prince » revisité par le dessinateur-vedette Joann Sfar (éditions Gallimard jeunesse, collection « Fétiche »), et un inédit, les « lettres à l'inconnue » (toujours chez Gallimard).

  

Certes, la production autour de Saint-Exupéry est, depuis sa disparition en méditerranée aux commandes de son avion le 31 juillet 1944, régulière et parfois pléthorique. Mais tout de même, pourquoi maintenant ? Comme les stoïciens, il était convaincu que « le destin guide qui consent, et traîne qui refuse ». Cette vision du monde si particulière, mélange de lucidité désespérée et de consentement serein à ce qui advient (comme Antonio Gramsci, Saint-Exupéry est pessimiste par la raison mais optimiste par la volonté) serait-elle devenue « tendance »? Non bien sûr, et c'est heureux : Saint-Exupéry n'a pas pu être récupéré, parce qu'il est, littéralement, irrécupérable. Mais ne boudons pas notre plaisir ! Un inédit de Saint-Ex, c'est une aubaine !

  

Et les « lettres à l'inconnue » sont superbes : Gallimard propose l'édition, en fac-similé, de neufs lettres illustrées, envoyées par l'écrivain entre mai 1943 et juillet 1944, à une jeune femme de 23 ans, officier et ambulancière pour la Croix-Rouge, rencontrée dans le train Oran-Alger. Ces lettres manuscrites étaient restées dans la famille de l' « inconnue », jusqu'à leur mise en vente chez Sotheby's en 2007. Leur acquéreur en a accepté la publication, mais l' «inconnue » a – fort heureusement – conservé son mystère et son anonymat.

  

Saint-Exupéry utilise le Petit Prince pour illustrer ses lettres, qui, pour certaines, se résument à une aquarelle du personnage avec une « bulle » (façon BD). Mais il est fascinant de constater que tout Saint-Ex est dans ces lignes : son incurable nostalgie de l'enfance, sa tendresse, son désespoir devant l'évolution d'une société où il ne retrouve pas ses repères. « Je n'aime pas le climat intérieur qui a remplacé mon printemps : un mélange de déception, de sécheresse et de rancune. Je baigne dans ce temps vide où je n'ai plus rien à rêver. » écrit-il, confondant une fois de plus son chagrin d'amour et son chagrin tout court.

  

Lisez ces textes si beaux, qui expriment une délicatesse de sentiments qui s'est bien perdue aujourd'hui.

  

Et pourquoi ne pas en profiter pour écouter (ça changera un peu de la lecture !) le Petit Prince lu par...Bernard Giraudeau, justement (Ed. Gallimard Jeunesse, 2CD de la belle collection « écoutez lire »), ou la voix de l'écrivain lui-même, lisant « Le courage de Guillaumet », extrait de « Terre des hommes » (Ed. INA/Radio France, 1994) ?

 

 

Denis LLAVORI

 

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