Les 10 et 11 mars 2018, Nicolas Ker se produisait en trio acoustique pour deux concerts-rencontres dans le cadre de notre festival Hibernarock. J’ai gardé de sa prestation à Aurillac un souvenir ineffaçable dont les images remuent encore en moi.
Mon métier, ma curiosité – mon âge aussi – m’ont conduit à assister à de nombreux spectacles dans divers lieux en toutes circonstances. Mais ce jour-là est resté pour moi différent de tous les autres. Les pisse-vinaigre vont me rétorquer : bien sûr « les morts sont tous des braves types » comme disait Brassens et Nicolas Ker est plein de qualités… maintenant qu’il est mort ! Mais Nicolas Ker a toujours été plein de qualités : sensible, fin, délicat, subtil, instinctif. Dans un univers où l’on pose souvent, lui ne posait pas, n’était pas en représentation, ne démontrait rien. Sa personne rayonnait d’authenticité, de franchise et de présence au monde.
Ce soir de mars 2018, 5 jeunes musiciens amateurs de la section « musiques actuelles » du Conservatoire d’Aurillac avaient été invités à se produire – comme nous le faisons souvent - en première partie du concert de Nicolas Ker. Il s’était discrètement assis dans la salle avec les spectateurs et suivait leur programme avec une empathie qui se lisait sur son visage : tendu, extrêmement attentif, solidaire et paternel, à la fois encourageant et protecteur. À l’issue, il a spontanément proposé au jeune batteur de le rejoindre sur scène pour l’accompagner pendant la dernière chanson de son propre show.
Tout le concert fut magique. Inspiré, comme flottant au-dessus de lui-même, Nicolas Ker a livré un spectacle intime, profond, émouvant, authentique et radical. L’émotion du public montait comme une buée : cet homme visait au cœur, et visait juste. Nous étions bouleversés par tant d’implication, émus par tant de vie, étreints par tant de fragilité assumée. Ce type avait mis ses tripes sur la table et son cœur sur la scène.
Épuisé, vidé, il a – comme promis – tendu la main au jeune batteur pour le hisser à ses côtés pour la dernière chanson. Et le public a vu l’impensable : cet homme magnifique a progressivement entouré le jeune musicien, le poussant à se dépasser, à remiser son trac et ses peurs. Par ses intonations, ses gestes, il l’a mis en valeur en s’oubliant lui-même, allant parfois jusqu’à tourner le dos au public pour mieux lui faire face et l’encourager. Il l’enveloppait avec chaleur et discrétion, lui insufflant la passion de la scène. À l’issue, le public a fait un triomphe à Nicolas Ker et à ses comparses. Et je crois bien avoir pleuré ce soir-là devant tant de générosité.
Nicolas Ker portait en lui des instants d’éternité et savait les faire partager. C’est cela être un artiste : semer chez le spectateur des moments qui ne s’effaceront plus. Nicolas Ker n’est pas mort puisqu’il vit encore en nous.
Denis LLAVORI
Une sélection des photos des deux concert Hibernarock de Nicolas Ker © Daniel Aimé
Notre playlist hommage à Nicolas Ker
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